La visitation
Luc, 1,43
Un jour dans une ville de Galilée du nom de Nazareth, vint un visiteur du très haut. La jeune fille qu'il cherchait se prénommait Marie. Fiancée à Joseph de Bethléem, elle était restée pure, simple et naturelle comme ces filles qui se consacrent à Dieu. A l'inverse, Gabriel avait la beauté parfaite et sulfureuse des Archanges, de sa bouche d'or tombaient des perles d'évangile, que les pucelles admiratives récoltaient en troupeaux.
Il trouva la belle se baignant nue dans l'eau jade d'un bassin de pierres. Il se défit de sa toge et avança vers elle. Dès qu'elle aperçut l'albâtre, elle courut se cacher sous les branches d'un arbre ; toutefois Gabriel l'apaisa: « ne crains rien, je viens à toi au nom du Seigneur, t'apporter une grande félicité. » Tenant son bâton divin à deux mains, il révéla à Marie: « Tu vois ma fille Dieu t'a choisie pour sienne et c'est par l'entremise de mon goupillon céleste que le saint esprit pénétrera en toi. As-tu placé ta confiance en ton Seigneur? Acceptes-tu son offrande? » Marie se dégagea du feuillu et fit face à l'archange: « Mon âme exalte le Seigneur, je suis son humble servante et c'est le cœur en joie que je le sers. » Gabriel mettant son cierge aux lèvres de la pucelle: « Reçois le symbole du très-haut et déguste-le pieusement. » Alors que la jeune fille s'étonne de voir gonfler le saint sacrement: « C'est la puissance et la force de ta foi qui fait grandir l'esprit saint qui te pénétrera » Marie s'inquiète alors: « mais Joseph, mon futur mari que dira-t-il si je ne suis plus vierge au mariage ? Je risque la lapidation et le rejet de toute ma famille. » Gabriel prenant une voix solennelle: « Ce que le Suprême veut, nul humain ne peut le contrer. Je visiterai Joseph et, s'il a la foi, il se tiendra à tes côtés. Tu resteras vierge car ton Seigneur a dit: « Deux chemins s'offraient à moi, un chemin pavé de roses et l'autre d'épines, et je choisis le plus difficile car c'est dans la souffrance que se fortifie la foi. » C'est ainsi que l'esprit saint viendra en toi : par la voie la plus pénible et la plus étroite. Tu seras la mère de l'éternel puisque tu auras su souffrir pour ton Dieu comme ton fils souffrira pour les hommes. » Marie se mettant à genoux: « pardonne-moi de t'offenser par mes peurs, la souffrance sera-t-elle supportable? » Gabriel mit la main sur la tête de l'ingénue pour la rassurer : « Si ta foi est grande, il n'y aura pas de souffrance, mais un plaisir séraphique. Retourne-toi et offre ta lune à ton Soleil divin. » Après avoir enduit le pontife d'huile sanctifiée, il l'introduit entre les fesses impies :
« Aimes-tu le Seigneur ton Dieu? » D'une voix chavirée: « Oh! Oui. » Prenant appui sur les hanches pleines, Gabriel engouffra tout le candélabre sacré jusqu'au tréfonds de l'étoile terrestre : « jures-tu de n'aimer que ton Dieu? Veux-tu du Saint Esprit en toi? » Dans un halètement: « tu es le Seigneur mon Dieu, je n'aime que toi et ne servirai que toi. Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai choisie. » Alors l'archange se mit à marteler la caverne sainte sous les cris de jouissance de Marie offerte à son maître, jusqu'à ce que le Saint Esprit soit libéré en un cri : « Amen ! ».
Puis l'archange s'éloigna dans la lumière.
Quelques temps plus tard Marie fut enceinte et vierge. Lorsque la communauté l'apprit, le rabbin convoqua Joseph et lui parla en ces termes: « si Marie t'a trompé, tu te dois de la répudier, notre loi est très claire là-dessus. » Mais Joseph rétorqua : « si je la répudie, elle sera lapidée et sa famille répudiée, non, je ne peux pas faire ça, j'ai confiance en Marie et en Dieu, l'archange Gabriel est venu me voir et m'a confessé les desseins de Dieu » Le rabbin posa sa main sur l'épaule de Joseph: « fais selon ta conscience, mais prends garde que ton histoire ne puisse être interprétée comme blasphème, va dans la paix du seigneur. »
Quelques mois plus tard, Marie rendit visite à sa cousine Elisabeth qui avait une grande nouvelle à lui apprendre. Elle la trouva assise sous un olivier dans la cour de sa maison. Son ventre rond ne laissait aucun doute sur son état. Pourtant sa cousine n'avait jamais pu procréer, aussi cet heureux événement la ravissait. « Comment m'est-il accordé que la mère de mon Seigneur vienne auprès de moi?
Car voici, aussitôt que la voix de ta salutation a frappé mon oreille, l'enfant que je porte a tressailli d'allégresse dans mon sein.
Heureuse celle qui a cru, parce que les choses qui lui ont été dites de la part du Seigneur auront leur accomplissement. Et Marie dit: Mon âme exalte le Seigneur, et mon esprit se réjouit en Dieu, mon Sauveur, parce qu'il a jeté les yeux sur la bassesse de sa servante.» Elisabeth attira Marie sous une alcôve à l'écart du regard des autres: « L'archange Gabriel est passé me voir juste avant toi, alors que j'étais au bord de la rivière pour rincer les vêtements il m'est apparu nu, « ne soit pas effrayée, ma fille » m'a t il dit « je viens au nom du Seigneur investi d'une mission » a-t-il ajouté, il a approché de mes lèvres le fléau du Seigneur que j'ai vu grandir à l'image de ma foi en Dieu. Sous mes baisers un liquide un peu amer m'a coulé dans la gorge « bois le suc divin et tu auras une révélation » a dit l'archange, puis il a pétri ma poitrine en récitant le cantique des cantiques « vois-tu ma fille, seules les femmes choisies par Dieu demeurent pures parce que Dieu n'est pas homme, cependant il descendra sur terre par l'une d'entre elle, tu auras l'honneur de mettre au monde l'annonciateur de sa venue, car Dieu t'a choisie. » Marie les larmes au bord des paupières: « Le seigneur est mon berger et bénie suis-je entre toutes les femmes » Elisabeth termina: « et bénie sois le fruit de tes entrailles douce Marie. »
Mais une question obsédait Marie: « dis-moi, Elisabeth, lorsque ton mari te prenait avant, t'a-t-il prise par l'anneau grec ? » Elisabeth sourit: « non, jamais c'est un pêché, seul un envoyé de Dieu peut ouvrir le passage angélique, seul l'être suprême peut donner la félicité. Gabriel en m'honorant m'a fait connaître un éblouissement tel, qu'aucun homme ne pourrait faire naître chez une femme. » Marie extatique: « C'est vrai je l'avoue un peu honteusement un tel plaisir ne peut être humain, sans quoi il serait interdit dans les tables de lois. Les femmes ne doivent pas jouir de l'homme, elles ne peuvent se réjouir qu'en Dieu. Leur tâche est de se consacrer entièrement à la famille, et c'est sans doute pourquoi Dieu a fait les hommes si peu entreprenants. Tu vois Dieu sait tout, et les voies du Seigneur sont impénétrables pour les hommes. »
La création de l'enfer
Ezéchiel, 28,14
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Tu m’attraperas pas, tu m'attraperas pas.
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Reviens ici... petit coquin ! Tu triches, on avait dit : interdiction de voler entre les nuages.
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Mais Seigneur, tu aimes ça quand je triche.
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Oh oui, oh oui, ça tend ma bite de courir après tes petites fesses vaporeuses, mais ne me fais pas trop attendre.
Surgissant de derrière une colonnade de cumulus, numéro 6 va poser ses longs doigts fins sur les yeux du Seigneur.
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Qui est là ?
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Ça doit être une grosse vilaine !
Alors numéro 6 enlevant sa toge étoilée, brandit son goupillon du délice qu'il introduisit dans le calice du Seigneur.
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Grosse oui, vilaine non.
Le Seigneur hurla :
-
Tabernacle !
C'est alors qu'on frappa à la porte de velours :
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Quel est le con qui me dérange ? s'instruisit le Seigneur.
-
C'est sûrement numéro 1, rétorqua numéro 6, il s'invente des problèmes pour passer le temps.
Le Seigneur demanda sur un ton impatient et colérique :
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Qu'est-ce qui ne peut pas attendre ?
Une voix à peine audible lui rétorqua :
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Certains anges demandent l'éternité plus un jour.
Le Seigneur extirpa numéro 6 de son calice qu'il but jusqu'à la lie. Après avoir repris de la décence, il répondit sans ouvrir la porte pour autant :
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Que leur faut-il de plus ? Ils ont l'éternité, les félicités, les lyres …
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Bah justement en parlant des lyres, numéro 2025 réclame une guitare.
-
Quoi ? Une guitare, pourquoi pas un bignou ? Il ne pourrait pas tout simplement s’enivrer d'ambroisie comme le font la majorité de ses compagnons ? Et puis aller folâtrer avec les muses, ou entre eux.
La voix reprit plus fluette que jamais :
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Que dois-je leur dire Seigneur ?
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Très bien, très bien, très bien, je viens. Je ne peux jamais profiter de mon éternité tranquillement, on se demande bien ce que deviendrait le paradis sans moi !
Le Seigneur partit donc, laissant derrière lui numéro 6 en débandade.
Ce n'est qu'après le passage de quatre comètes que numéro 6 revit le Seigneur. Mais sa joie fut de courte durée, car celui-ci lui annonça une nouvelle incroyable : afin de calmer les anges en les occupant, Dieu avait décidé de créer un monde et de peupler celui-ci.
-
Dis-moi numéro 6, ma jolie, que penses-tu si j'inventais le temps et que je le découpais, donnant une part à chaque ange et un mois à chaque planète ? Je ferai le jour et la nuit.
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Le jour et la nuit ? A quoi ça sert ?
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Tais-toi numéro 6, tu m'empêches de créer. On va dire que le jour c'est quand il fait jour, et la nuit, c'est... quand il fait nuit.
Numéro 6 boudait un peu sur son étoile. Il marmonnait tout bas :
-
Le jour c'est le jour, la nuit c'est la nuit... ridicule...
-
Donc je disais la découpe du temps c'est fait, maintenant on va dire qu'il s'est déjà passé un jour dans ce nouveau monde.
Numéro 6 se leva énervé.
-
Non mais regardez-là sa Seigneurie, il nous fait son numéro du tout-puissant ! Le paradis ça te suffisait plus ? Et moi je te suffis plus ? Quel besoin tu as de dégotter une autre planète ? On va pas en faire tout un monde, quand même ?
Le Seigneur vexé rétorqua :
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Et bien oui justement, on va en faire tout un monde. Ou plutôt JE vais en faire tout un monde, à ma gloire à MOI. Et puis toi tu m'embêtes, retourne dans ton stratus.
Numéro 6 vexé à son tour, s'en alla en claquant la porte, mais à peine avait-il fait demi-tour :
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Allez reviens, tu vas pas bouder, j'ai une autre idée pour mon monde, j'ai besoin de ton avis.
Numéro 6 s'emporta :
-
Mais enfin tu te moques de moi, tu me veux, tu me veux plus, tu me veux de nouveau. Et puis ton monde comme tu dis, c'est TON monde, ça me regarde pas.
Le Seigneur passa la main dans les cheveux boucle d'or de numéro 6 :
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On ne va pas se fâcher pour un caprice, ce n'est pas le premier que tu me concéderas.
Le Seigneur avait raison, numéro 6 cédait à tous ses caprices et il acquiesça une fois de plus.
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Très bien, très bien, très bien, raconte-moi ce monde...
Le Seigneur s'assit sur un immense coussin de cumulus et commença :
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Tout d'abord, je veux une grande baignoire, et puis un plafond tout bleu, et enfin je veux que mon monde soit rond et plein de terre brune. Qu'en dis-tu numéro 6 ?
-
Ouais, pas génial pour l'instant. T'as pas mieux ?
Le Seigneur se creusa la tête et trouva une autre idée :
-
Oh oui, oh oui, oh oui, je vais y mettre des animaux et puis des arbres, des plantes, des décorations, plein de trucs rigolos,...
Le Seigneur dessina de son trident sur une constellation orangée une carte :
-
Regarde numéro 6 si je ne suis pas ingénieux, là je vais mettre le Soleil pour le jour, là la Terre qui tournera autour du Soleil et sur elle-même pour la nuit et les marées. Là, Saturne, Pluton, Mars, Vénus, la constellation du Capricorne, la Grande Ourse...
Petit à petit la carte de l'univers se formait ce qui rendait le Seigneur particulièrement satisfait.
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Alors numéro 6, t'es soufflé là non ?
Numéro 6 dut reconnaître que sur ce coup-là il pouvait féliciter son dieu.
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Allez viens ici ta Seigneurie que je te donne ta récompense bien méritée.
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Oh oui, oh oui, ça tend ma bite !
-
On va finir par le savoir, bientôt tu pourras m’appeler Satan.
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Ha ha ha ha, elle est bien bonne celle-là : Satan m'habite ! C'est entendu, désormais numéro 6, tu t'appelleras Satan.
-
Très drôle, dit Satan en embrochant le Seigneur.
Les ronflements de Dieu firent s'entrechoquer les nuages en un grondement sonore. L'un d'eux se brisa et fit tomber la première pluie sur son monde. Alors Dieu regarda son monde et il dit à Satan :
-
C'est bien, je suis content. Mais j'ai l'impression qu'il manque quelque chose à ce monde, voyons, voyons, des Troglodytes, des Polyphores, des Mastodontes, non, tout y est. Et soudain le Seigneur se frappa le crâne : et si je peuplais ce monde de créatures qui vous ressembleraient, mais sans vos pouvoirs et vos ailes ?
Satan sortit par la porte de derrière sans que Dieu ne le voit pleurer. Il en était sûr, il n'était plus le préféré de Dieu. Bientôt il serait relégué avec les anges de deuxième classe à faire briller les étoiles, ou nettoyer les anneaux de Saturne. Il se demandait ce qu'il avait bien pu faire pour déplaire à son Seigneur. Peut-être justement en avait-il trop fait. Dieu était un être gâté, capricieux et orgueilleux. Les êtres dont il allait peupler son monde, s'ils étaient à son image, ne pourraient donner qu'une fin catastrophique. En tous cas lui Satan, ne serait pas de la partie. Il trouvait cette idée de monde totalement ridicule. Il décida de prendre quelques vacances avec des amis. Ils partirent sur la voie lactée. Lorsqu'il revint, il courut voir son Seigneur. Il lui avait ramené un bouquet de couleurs boréales. Il rentra sans frapper, comme il en avait l'habitude, et surprit Dieu en plein ébat avec sa ridicule créature terrestre.
-
Mais qu'est-ce que ça veut dire ? Je veux bien que je ne te suffise plus, mais me remplacer par cette abomination, c'est plus que vexant, c'est une insulte.
-
La barbe ! répondit Dieu.
-
Je te laisse une dernière chance, votre altesse, ou tu détruis cet être insuffisant, ou je pars.
-
Mais oui, mais oui, pars. Et tu irais où ? Tu sais bien que sans moi, tu n'es rien.
Cette dernière réflexion convainquit Satan et la rage au cœur, il rentra chez lui. Puis il convoqua ses amis :
-
Dieu s'est moqué de nous depuis trop longtemps, nous n'avons même pas de nom, nous ne sommes que des numéros à son service, et quand il n'a plus besoin de nous, il nous jette. Cette fois, c'en est assez pour moi, je vous propose de créer nous aussi notre propre monde.
Lucie regarda avec amour son maître. Elle était à son service depuis des Lunes et le resterait éternellement. Parfois, son maître voulait faire les choses seul, alors elle lui rappelait : « laisse Lucie faire ». Alors depuis, Satan à l'instar de Dieu, l'avait surnommée Lucifer. Tous deux choisirent parmi leurs amis, ceux qui viendraient les rejoindre dans leur nouveau monde. Satan dit à la ronde :
-
Puisque Dieu nous enferme dans ses lois, ses désirs, puis nous ferme ses portes, nous appellerons notre nouveau monde Enferme.
-
Oui, et nous mettrons une immense porte en fer.
-
Ah je suis sûr que mon chien Cerbère serait d'accord pour la garder.
Et Satan d'ajouter :
-
Va pour Enfer.
Ainsi s'évapora une centaine d'anges qui refusèrent désormais d'être des numéros au service d'un Dieu qui leur préférait les humains.
Satan avait choisi le centre du Soleil comme domicile : il y faisait chaud, il avait vu sur le paradis et sur le monde de Dieu. Car il avait décidé de se venger du Seigneur. Désormais, lui-aussi serait le Seigneur de son monde. Et il passerait tout son temps et celui de ses anges à contrecarrer les plans de Dieu pour ses horribles créatures terrestres. Asmodée lui avait proposé un plan qui devait déstabiliser complètement le monde de Dieu : créer une compagne féminine à son premier humain qu'il avait nommé Adam. Lucifer lui avait soufflé qu'il devrait confier cette tâche à Lilith. Aussitôt dit, aussitôt fait : Eve fut créée et envoyée sur Terre pour séduire Adam et le mener à sa perte. A chacun son tour de connaître les affres de la jalousie. Comme Satan s'y attendait, Dieu voulut vérifier la fidélité de son humain, et pour se faire, il planta dans le jardin d'Eden, un arbre interdit. Il commanda à Adam de ne jamais manger de son fruit. Satan envoya Damballa parler à Eve :
-
Ma fille, le Maître aimerait savoir si tu es satisfaite de ta condition.
-
Oh oui, très, dites-lui que je le remercie, mais ce Adam ne se préoccupe guère de moi, comment faire pour qu'il me remarque ?
-
Ma fille, le plaisir d'un homme passe d'abord par son estomac, tu vois cet arbre magnifique, hé bien donne-lui les fruits à manger, et surtout, n'omet pas de lui dire que c'est son Dieu qui l'a voulu.
-
Mais s'il refuse ?
-
Lilith t'a donné un pouvoir qui s'appelle séduction, sers-t-en sans modération.
Aussitôt, Eve appela Adam :
-
Mon chéri, viens voir, j'ai quelque chose de bon à te faire déguster...
Et c'est depuis que Dieu et Diable poursuivent leur combat à travers les hommes.
Le déclin de Salomon
Dieu créa un jour un roi qui lui ressemblait : blond, les yeux bleus séducteurs, le sourire vainqueur, la démarche féline ; il l'avait doté de facultés divinatoires et d'une grande sagesse. Ce personnage n'avait pas échappé à l'attention vigilante du roi des enfers :
— Lilith, vient ma belle, on va s'amuser...
Lilith toujours partante pour les mauvais coups, écouta attentivement le plan de son ami.
Un soir donc alors que Salomon se reposait sur les coussins de soie du patio en profitant de la douce chaleur du soir, Il vit à travers les voiles que faisait frissonner le vent, une forme voluptueuse, aussi fragile que le jade et aussi fine qu'un pétale, une fine odeur d'orchidée flatta les sens du vieil homme, tandis qu'une musique douce endormait ses méfiances.
Lilith qui avait été forgée par Lucifer avec la cendre infernale, n'avait d'autres desseins que de nuire à cette humanité dégénérée, qu'avait crée dieu en faisant d'Eve une femme soumise à sa créature. Elle prendrait d'autant plus plaisir à détruire ce petit roi de pacotille, que celui-ci représentait le symbole de ce dieu rancunier et capricieux, qui avait fait de son roi un exilé des soi-disant bienheureux. Ici, en enfer tout le monde était libre et si la musique jouait parfois trop fort, personne ne s'en plaignait, l'amour était universel et sans civilité, mais pas dénué de finesse et de sensualité. Il y faisait chaud et la fidélité n'existait pas. Lilith n'avait jamais vu le paradis, mais son ami Satan lui en avait beaucoup parlé comme d'un endroit intransigeant mené par les caprices d'un seul dieu.
Salomon, nouveau roi d’Israël menait une vie fastueuse, mais triste toutefois car il s'ennuyait . Bien qu'il ait contracté plusieurs mariages fructueux pour enrichir son royaume, les femmes arabes ne lui apportaient plus rien qu'il ne connaisse déjà, et il s'en était lassé, les reléguant dans un harem digne des élues, qu'il ne visitait jamais. Les pauvres femmes devaient se contenter de se masturber. Parfois l’eunuque leur fournissait, au risque du fouet, de superbes godemichets, taillés par les plus talentueux artistes de Jérusalem.
Cette apparition soudaine, si peu commune de ses épouses et de son entourage, l’émouvait jusque dans son caleçon de lin tissé par Levis, que le mont Sinaï déformait.
— Je suis là pour charmer et divertir, veux-tu de moi sans réserve ?
La voie sensuelle avait questionné le maître des lieux comme si elle connaissait par avance sa réponse.
Une fraction de seconde, Salomon, se rappela les avertissements de son dieu :
Si tu respectes mes prescriptions et mes règles, j'affermirai ton autorité royale, ’Si en revanche tu te détournes de moi, si tu abandonnes les prescriptions et les commandements que je t'ai donnés, si tu vas servir d'autres dieux et te prosterne devant eux, je t'arracherai de mon territoire, que je vous ai donné, je rejetterai loin de moi cette maison, que j'ai consacrée en l’honneur de mon nom, et j'en ferai un sujet de proverbe et de raillerie parmi tous les peuples.
Une main aux doigts si fins mit rapidement un terme à ces pensées désagréables, lorsqu'elle enveloppa son sexe d'une chaleur qui lui était alors inconnue. Sous cette sensation unique son cèpes répandit trop vite la sauce.
La bouche en feu d'Astarté réalisa l'exploit de tendre à nouveau bien droit l'obélisque royal. Elle se glissa sur lui, il entra alors dans une mer de sang faisant jaillir des murs rouges tel Moïse lors de sa propre traversée. Une sourde voix semblait lui parvenir comme en songe :
Tu n’auras pas de relations sexuelles avec une femme pendant que ses règles la rendent impure. Lévitique 18:19
et la voix continuait ainsi :
Si un homme couche avec une femme pendant ses règles, ils seront tous deux retranchés de leur peuple, pour avoir l’un avec l’autre découvert la source de son sang. Lévitique 20:18
Le baiser brûlant d'Astarté lui fit gommer cette voix qui gâchait son plaisir. Lorsqu'il ouvrit les yeux, il baignait dans un plaisir que même son dieu n'avait pas réussi à lui faire vivre.
Après tout, il lui avait construit moult palais, avait conduit son peuple vers la bonne terre et avait divulgué son message un peu partout comme son seigneur le lui avait demandé : il méritait bien une récompense ; et depuis une centaine d'années qu'il vivait il n'en avait trouvé que peu dans les richesses et les mariages. Et puis... c'était bien loin l'éternité.
C'est ainsi que le roi Salomon se livra à l'orgie et à la débauche. Lilith avait invité le beau monde : Astarté, Moab, Moloch,Kemosch, pour montrer au divin que, quelques soient ses créatures, elles seraient faibles face à la luxure et sombreraient dans les plaisirs qui lui seraient offerts par les vassaux infernaux.
Il était écrit : Son cœur n’est pas parfait avec l’Éternel son Dieu, comme le cœur de David, son père (1 Rois 11:4).
Satan remercia grandement Lilith qui avait poussé le vice suprême jusqu'à faire dévier Salomon à tel point que celui-ci fît construire des palais et des statues à leurs effigies, reniant son Dieu déshonoré par son serviteur, qu’Il avait comblé de ses faveurs ! La victoire était totale ! Enfer I Paradis 0 !